Les dictionnaires de données Milieux Humides du Sandre et leurs scénarios d’échanges
Un travail collaboratif pour établir des référentiels de données nationaux sur les milieux humides
De nombreux inventaires sur les milieux humides sont actuellement effectués en France. Ils permettent notamment d’identifier, de cartographier et de caractériser les milieux humides. Cependant lors de la bancarisation de ces données d’inventaires, on peut se rendre compte qu’il y a quelques différences dans le vocabulaire utilisé. Par exemple, un « milieu humide probable » peut, selon les territoires, être nommé de « milieu humide potentiel », de « zone à dominante humide », d’ « enveloppe potentielle de zone humide », etc. Ainsi, lorsque l’on remonte ces données milieux humides à l’échelle nationale, cela peut engendrer des difficultés d’interprétations.
L’objectif de ces travaux est de normaliser l’ensemble des entités, attributs et listes de valeurs employés pour décrire et inventorier les milieux humides dans des dictionnaires de données du Sandre. Les travaux ont été élargis de façon à prendre en compte l’ensemble des données milieux humides en incluant ainsi les pré-localisations, les zones d’études et les suivis.
Qu’est-ce que le Sandre ?
Le Service d’administration nationale des données et référentiels sur l’eau (Sandre) a pour mission, d’établir et de mettre à disposition le référentiel des données sur l’eau du Système d’Information sur l’EAU (SIE). Ce référentiel, composé de spécifications techniques et de listes de codes libres d’utilisation, décrit les modalités d’échange des données sur l’eau à l’échelle de la France. D’un point de vue informatique, le Sandre garantit l’interopérabilité des systèmes d’informations relatifs à l’eau.
Suite aux constats (2009, MEEDDM), d’une évidente disparité du vocabulaire employé, d’un faible emploi du référentiel « Tronc commun » et d’une forte hétérogénéité des protocoles de caractérisation des milieux humides et des méthodes de bancarisation des données, le Sandre a été sollicité pour garantir la standardisation des concepts des milieux humides, pour spécifier les évolutions du vocabulaire et pour faire évoluer le « tronc commun ».
L’implication du Forum des Marais Atlantiques
Le Forum des Marais Atlantiques est fortement impliqué depuis 2000 dans la collecte et la bancarisation des données d’inventaires des milieux humides dans le cadre de ses partenariats avec les Agences de l’Eau mais également avec des Conseils départementaux et régionaux, des techniciens « zones humides », des gestionnaires SAGE, etc.
Cette implication se décline sous plusieurs formes :
- L’appui et l’assistance dans le cadre de mise en place de cahiers des charges, de pré-localisations, d’inventaires, de priorisation des milieux humides ;
- La mise en forme des données, de compilation, de mise en ligne de ‘information ;
- De journées d’échanges et de formations dans le cadre des données SIG, sur la flore, la pédologie, la gestion, etc. ;
- La gestion du logiciel Gwern et du Réseau Partenarial des Données sur les Zones Humides ;
- etc.
Par son expertise sur le sujet, le FMA était donc tout désigné pour s’impliquer fortement dans l’élaboration de ces documents.
Un groupe de travail national
Afin de concevoir ces dictionnaires de données, un groupe national sur les milieux humides a été mis en place avec deux ambitions :
- L’organisation des données sur les zones humides (actualisation et création de dictionnaires des données) ;
- La production et la mise à disposition des connaissances sur les milieux humides (les démarches de pré-localisation, d’inventaire et de suivi).
Ce groupe est constitué à la fois d’experts locaux (syndicats de bassins versants, etc.), régionaux (DREAL, Agences de l’eau, etc.) et nationaux (BRGM, MNHN, INRA, etc.). L’équipe d’animation de ce groupe est composée du Sandre et du Forum des Marais Atlantiques mais également de la Fédération des Conservatoires d’Espaces Naturels, de l’Office Français de la Biodiversité et du Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire.
Dans le cadre des travaux de ce groupe, il a été décidé que les notions, d’inventaire, de milieu humide (probable/effectif) et de suivi soient des référentiels nationaux diffusés par le Sandre et donc respectant un formalisme (dictionnaire de données) et des règles d’administration (exemple : un code sandre unique, la gestion des mises à jour, l’accessibilité des données, …).
Pourquoi des dictionnaires de données ?
Ces dictionnaires de données permettent d’établir un vocabulaire commun sur les milieux humides à l’échelle métropolitaine tout en prenant en compte, quand cela est possible, les DOM-TOM. Ils listent l’ensemble des entités, attributs et nomenclatures utilisés pour décrire ces zones. Chaque élément disposant d’une définition afin de clarifier les termes. Les différents concepts et attributs sont mis en relation via le modèle conceptuel de données (*).
Le travail effectué pour élaborer ces dictionnaires a été fait de façon à prendre en compte toutes les spécificités sur les données et les métadonnées déjà existantes sur cette thématique. Chaque terme a été travaillé afin de trouver un consensus national.
L’ensemble des données acquises dans ce cadre devront par la suite être conformes aux préconisations du Sandre pour intégrer pleinement ces référentiels. Le Sandre sur cette thématique garantit l’interopérabilité pour le SIE. Il a également travaillé avec d’autres systèmes d’informations : le Système d’Information sur la Nature et les Paysages (SINP) et le système d’information sur le sol. Ainsi les documents produits par le Sandre sur cette thématique est interopérable entre ces systèmes.
A ce jour, deux dictionnaires de données ont été validés et publiés.
Le premier dictionnaire “Description des milieux humides”
Ce premier dictionnaire permet d’avoir une approche globale des milieux humides. Il aide à décrire le milieu humide par rapport à son territoire.
En effet, le cœur de ce document porte sur le milieu humide en lui-même. Ainsi, il est proposé de décrire le milieu humide par une vingtaine d’attributs. Toutefois, l’ensemble de ces attributs n’est pas à renseigner obligatoirement (le statut obligatoire ou facultatif d’un attribut ne ce sera précisé que dans le scénario d’échange), ce sont des propositions qui permettent de décrire au mieux le milieu. Il est par exemple proposé de choisir des valeurs dans la typologie Corine Biotope, EUNIS, SDAGE, etc. Ces typologies, comme toutes les autres nomenclatures des dictionnaires, sont disponibles sur le site du Sandre.
Sur le schéma ci-dessous, nous avons simplifié le modèle conceptuel de données présent dans le dictionnaire. En effet, à la différence de ce dernier, il y a, ici, uniquement les liens entre les différentes entités de ce dictionnaire.
Ainsi nous pouvons voir que la notion de milieu humide regroupe quatre grands ensembles (en vert) : les zones humides selon la convention de Ramsar, les marais, les zones humides loi sur l’eau et les zones humides loi sur l’eau avec l’arrêté d’identification et de délimitation du 24 juin 2008 modifié.
Le reste du document est centré sur le diagnostic du milieu humide où il est notamment abordé les concepts de menace, d’atteinte, de fonction, de service, etc.
Si on prend l’exemple du concept « menace », on peut voir que le milieu humide peut n’avoir aucune menace comme en posséder plusieurs. La nomenclature du Sandre propose 22 types de menaces différentes. De plus, à chaque menace peut être associé un niveau de menace (inconnu, faible, moyen ou fort), une date et un commentaire.
Enfin, dans ce dictionnaire nous abordons également le type d’activité humaine pouvant avoir lieu au sein ou autour du milieu humide. Et nous proposons de lister l’ensemble des préconisations d’actions pour le milieu humide, le budget global alloué à ces propositions d’action, etc.
Le deuxième dictionnaire “Acquisition des données de pré-localisation, d’inventaire et de suivi sur le Milieu et de suivi sur le Milieu Humide”
Le second dictionnaire permet, lui, de définir la structuration des données brutes acquises dans le cadre d’une pré-localisation, d’un inventaire ou d’un suivi de milieu humide. L’objectif de ce dictionnaire est de proposer aux producteurs de données une harmonisation des pratiques et d’ainsi garantir l’interopérabilité entre les différentes bases de données déjà existantes.
Le modèle simplifié de ce dictionnaire, ci-dessous permet de voir les liens entre les différents cadres d’acquisition des données (pré-localisation, inventaire, suivi).
La zone d’études correspond à l’aire géographique à l’intérieur de laquelle sont effectuées toutes les études de pré-localisation, d’inventaire et de suivi. Elle est délimitée par un ou plusieurs critères (limites de bassin versant, communale, Natura 2000, etc.).
La pré-localisation permet de mettre en évidence la présence probable de milieux humides sur le territoire de la zone d’études. Ces pré-localisations peuvent se baser sur plusieurs méthodes. Ces dernières peuvent être combinées afin de parvenir à un recensement le plus exhaustif et précis possible de ces milieux humides probables.
L’inventaire permet de déterminer la présence de végétations hygrophiles et/ou de sols caractéristiques des milieux humides grâce à des méthodes d’identification effectuées sur le terrain. L’objectif étant de cartographier précisément les milieux humides effectifs.
Le suivi, quant à lui, permet de détecter des tendances d’évolution du milieu humide grâce à la collecte de données répétées dans le temps et l’analyse de ces informations.
Les scénarios d’échanges et les autres documents à venir
Sur la base des documents présentés ci-dessus, le groupe de travail a établi des documents expliquant les flux de données et leurs formalismes. Ces documents sont des scénarios d’échanges. Plus précisément, ils décrivent les modalités d’échanges des données milieux humides. Ils servent à échanger des données en s’appuyant sur un format.
Ces documents reprennent la sémantique des dictionnaires et détaille le caractère obligatoire et facultatif, la syntaxe, des données échangées et les modalités techniques et organisationnelles de l’échange. Un scénario d’échange repose sur un ou plusieurs dictionnaires de données et se matérialise par des fichiers aux formats CSV, XSD et PDF.
Selon les préconisations du groupe de travail, il devrait y avoir un scénario par cadre d’acquisition. C’est-à-dire un document pour la pré-localisation, un pour l’inventaire et trois autres pour le suivi des milieux humides : faune et flore , sol, eaux souterraines.
Ces scénarios d’échanges sont d’ores et déjà publiés sur le site du Sandre.
Enfin, un troisième et dernier dictionnaire va être constitué sur cette thématique milieu humide. Il abordera le suivi de l’évaluation d’un milieu humide. L’objectif est de répondre à la question : comment mon milieu humide évolue-t-il ? Les mots clefs de ce futur dictionnaire seront : indicateurs, actions, évaluations. De nombreux bassins ont déjà travaillé sur ce sujet, il s’agira pour le groupe de regarder ce qui existe et de se mettre d’accord sur une sémantique pour le niveau national.
Comment les mettre en pratique ?
Deux travaux sont en cours de réflexion afin d’aider les producteurs de données à prendre en considération ces dictionnaires. Le premier consisterait à concevoir un outil, conforme aux modèles de données du Sandre, et qui permettrait l’acquisition des données d’inventaires sur le terrain. Le second permettrait d’avoir une banque nationale sur les milieux humides qui intégrerait l’ensemble des données de zones d’études, de pré-localisations, d’inventaires et qui mettrait également de mettre en visibilité les données de suivis.
Nous ne manquerons pas de vous tenir informés de ces évolutions mais elles n’auront aucune incidence sur la validité des données d’inventaires passées.
(*) un modèle conceptuel de données : schéma représentant la structure de façon formelle du système d’information du point de vue des données, c’est-à-dire les dépendances ou relations entre les différentes données du système d’information. Les concepts de base sont : entité (ou objet ou classe), relation ou association, propriétés ou attributs, identifiant.